Ma rencontre avec les Grands Requins Blancs d'Afrique du Sud

Article écrit par Adeline Lobbes

Ayant vécu en Afrique du Sud, sublime pays d'Afrique Australe, j'ai saisi un jour l'occasion d'aller à la rencontre des grands requins blancs, aventure commençant à Gaansbai, situé à 120 Km d'Hermanus, près de Capetown.

Le requin intrigue l'homme depuis la nuit des temps, entre admiration, fascination et diabolisation, cet animal sublime et indispensable à l'équilibre des océans, provoque en nous tout un éventail de sentiments et d'émotions qui peuvent aller des plus positives aux plus dangereuses. C'est pourtant un animal inimaginable de beauté et de sérénité que l'on découvre lorsque l'on se donne la peine d'aller à sa rencontre sans attentes et sans préjugés.

Rendez-vous à 6h du matin dans la maison de l'organisme qui nous emmènera, pour un petit déjeuner copieux car il parait que la faim est l'une des raisons du mal de mer. Puis nous sommes sur le départ, embarquement dans le bateau, on enfile les combinaisons de plongée et on se tient près, jusqu'à notre arrivée en mer, au point stratégique, où devrait avoir lieu notre rencontre. Nous sommes tous plus ou moins dans le même état, traversés par de nombreuses émotions différentes mais complémentaires, l'impatience, l'inquiétude, l'envie et la peur.

La cage est en place, accrochée au bateau, il suffit de la descendre un peu plus bas, afin de nous permettre de descendre dans le fond de la cage pour observer le requin, et de remonter à la surface pour nous nourrir en oxygène. En plus de notre combinaison, nous portons une ceinture de plomb à la taille qui nous permettra de tomber rapidement au fond de la cage à l'approche des requins.

J'avais choisis une agence d'éco-tourisme pour faire ce voyage, afin que cette rencontre soit organisée dans le plus grand respect des requins et de leur environnement, donc pas d'appât ni de traque, une seule ligne de conduite : "si les requins sont au rendez-vous c'est parfait, sinon il nous faudra rentrer au port". La chance est avec nous et au bout de 30 minutes sur place, une première femelle approche du bateau, curieuse et intéressée par notre présence, elle fait le tour du bateau et reste à proximité. Puis une deuxième, et un jeune mâle approchent également. L'heure est venue d'aller les rencontrer de plus près.

9h du matin et me voici prête à descendre dans la cage, l'eau glaciale de l'océan atlantique me transperce la peau malgré la combinaison, mon coeur bat la chamade et mes jambes sont molles, mais j'y suis!

Dans l'eau, "installée" dans la cage, soudain, l'un de nos accompagnateurs crie "shark shaaaark!!"* c'est le signal, c'est le moment de prendre une grande respiration et de se laisser tomber au fond de la cage. Tout est calme d'un coup, c'est un monde serein et paisible qui m'enveloppe, alors que je vois pointer le rostre de ce magnifique animal, c'est une femelle, elle évolue dans l'eau avec grâce et volupté, je la sens curieuse et intriguée par cette brochette d'humains rangés proprement devant elle, sous l'eau, dans leur caisson de protection. Elle passe et repasse devant nous à plusieurs reprises, calme et décidée, j'ai envie de tendre la main hors de la cage pour toucher sa peau et créer un contact physique avec elle mais je m'en empêche. Elle est belle, elle est massive et puissante, elle m'impressionne et m'attire en même temps. Une autre femelle s'approche également, puis le jeune mâle, et nous assistons très vite à un ballet de requins autour de la cage.

Notre temps s'écoule à la vitesse de l'éclair bien entendu, et à peine aurais-je eu le temps d'imprimer le détail de leurs yeux, de leurs peaux et de leurs nageoires dans ma mémoire, qu'il est temps de sortir pour laisser notre place aux autres participants, mais ces 15 minutes sous l'eau en compagnie des grands requins blancs auront changé ma vie et ma vision de ces seigneurs des mers à jamais.

Le requin est une espèce parapluie, de son existence dépend une multitude d'autres vies, et aussi la survie des océans.

90% de la population mondiale de requins a disparu au cours de ces 20 dernières années. Victimes du finning (le fait de trancher les ailerons des requins vivants et de les remettre à l'eau toujours vivant pour encore quelques longues minutes d'agonie avant de mourir par suffocation) pour terminer en soupe d'ailerons de requins, un plat très prisé en Asie. Victimes aussi des produits de beauté à base de squalène promettant la jeunesse éternelle, de la surpêche etc...Si les requins disparaissent, les océans disparaissent et sans les océans, nous disparaitrons à notre tour.